La lecture m’accompagne et me nourrit au quotidien depuis l’enfance. Partager les ouvrages qui m’ont touchée intéressée amusée scotchée ou bouleversée est un plaisir supplémentaire. Et un tremplin vers le partage intime et ultime : l’écriture, qui m’anime et me passionne tout autant.

Rose, de Tatiana de Rosnay

De son talent de conteuse, l'écrivaine se glisse dans les souliers de Rose, habitante de la rue Childebert, tout près de l'église Saint-Germain des Prés. À l'unisson de nombreuses rues de la capitale, le quartier fait partie du grand projet de modernisation du préfet, le baron Haussmann. Depuis leur maison familiale, Rose adresse à son époux décédé des lettres dans lesquelles lui raconter sa vie, celle de ses amis et voisins, où petit à petit oser formuler ce qui l'effraie, ce qui la ronge. Le souvenirs des disparus, la vie du quartier, son combat, ses espoirs, ses blessures, sa révolte.

La forme épistolaire apporte au récit une dynamique renforcée par la tension que le lecteur sent monter au fur et à mesure de l'approche d'une échéance inéluctable. Au fil de ses souvenirs Rose replonge dans le passé, dévoilant de nouveaux pans de sa vie. L'écriture adopte un style bien accordé à cette fin du XIXème siècle, pour peindre avec des sons, des odeurs et des couleurs la vie quotidienne des parisiens, adultes, enfants, commerçants, nobles ou bien modestes.


Ce roman est peuplé de beaux personnages de femmes autour de la narratrice : son amie fleuriste, l'élégante baronne, maman Odette, ... Très documenté, il offre une passionnante promenade dans un Paris perdu, oublié, et propose, face aux rénovations nécessaires pour une ville plus saine et plus moderne, une tranche de vie des habitants, ceux qui ont été expropriés, obligés de changer de lieu de vie, d'abandonner à la démolition leur histoire et leur passé.


Rose est de ces livres que l’on regrette de terminer, dont on tourne avec tristesse la dernière page pour le laisser résonner en soi avant d’en choisir un autre. 


Rose, de Tatiana de Rosnay

Dans une très jolie édition chez Héloïse d'Ormesson

Et au Livre de Poche avec cette belle illustration : Boulevard dans Paris 1885 (Akseli Valdemar Gallen-Kallela)